samedi 20 juin 2009

Je suis rousse, suave et alors ?

S'il n'est pas tous les jours facile d'être suave, il est encore moins facile d'être rousse. On me l'a confié. Je ne parle pas d'expérience. Et il n'y a guère qu'à Hollywood dans les années 50 que nos amies du troisième bulbe, c'est à dire ni blonde ni brune, vécurent heureuses et reconnues. Pourquoi cette exception, la réponse tient en un mot : Technicolor. On en conviendra, il était difficile de trouver, en cette période d'explosion de la couleur, plus cinématographique qu'une chevelure d'un roux flamboyant. On dénombre par conséquent, et je le rappelle, c'est un phénomène si isolé qu'il mérite d'être signalé, une dizaine de rouquines qui ne durent leur célébrité qu'à la couleur, rarement naturelle, de leurs racines.
Citons par exemple Lucille Ball, Susan Hayward, Maureen O'Hara, Rhonda Fleming, Greer Garson ou Rita Hayworth, la rousse ultime dont le portrait fut même peint sur une des premières bombes atomiques lancée sur l'atoll de Bikini ce qu'elle prit fort mal. Et pour voir qui était qui, dirigez-vous vers le fantastique et si suave blog "Stirred, Straight up, with a twist" auquel vous pouvez accéder grâce à cela :




Au milieu de cet océan de cuivre et d'auburn, il convient de distinguer une héroïne, ni plus rousse, ni meilleure comédienne que ses consoeurs mais qui a le mérite, elle, d'être toujours vivante : Arlène Dahl, et dépêchons-nous puisqu'elle vient de fêter ses 81 ans.


Arlène Dahl donc. Très rousse. Moins rousse. Mais toujours suave.

Que dire de sa filmographie, peu de choses : elle est magnifique dans "Voyage au centre de la Terre" dans une rôle écrit pour elle et qui n'existe même pas dans le roman de Jules Verne, elle est très bien habillée dans "Deux rouquines dans la bagarre" dont elle dessina les costumes et surtout, elle est étonnante sur le mode "mais que fait-elle là ?" dans le film de Cayatte "Les chemins de Katmandou" avec Jane Birkin et Serge Gainsbourg. Pour le reste, comme on ne l'engageait pas particulièrement pour son panel d'émotions, elle décora de nombreux films d'aventures où elle finissait entre les bras puissants de flibustiers, de touaregs ou de cowboys.



Que dire de sa vie privée, beaucoup plus de choses. Mariée 6 fois, elle échangea quelques époux avec ses amies Lana Turner et Esther Williams, deux en l'occurence, Lex Barker, un sous-tarzan surnommé "l'homme le plus beau du monde" qui la quitta pour Lana Turner et Fernando Lamas qu'elle emprunta à Lana avant qu'il n'épouse Esther. Elle est l'heureuse maman de Lorenzo Lamas, le héros de la défunte série "Le rebelle" aperçu récemment dans Amour Gloire et Beauté où il incarnait pendant de très longs épisodes un capitaine de pompier qui finissait par devenir aveugle après un incendit. Et elle tient depuis une trentaine d'années une rubrique d'astrologie publiée dans de nombreux magazines aux Etats-Unis, chroniques qui étaient, raconte-t-on, examinées à la loupe par Nancy Reagan avant que son mari ne prenne la moindre décision.
Mais en quoi tout cela est-il suave ? Cela le devient lorsqu'on apprend que son époux Fernando Lamas déclarait qu'être marié avec elle était un enchantement la nuit mais un cauchemar le jour puisqu'elle ne se montrait jamais sans maquillage et que c'était comme de vivre avec Elisabeth Arden : dans un institut de beauté permanent. Il jura d'ailleurs ne l'avoir jamais vu au naturel.
Et cela le devient totalement lorsqu'on parcourt le livre qu'elle publia en 1965, "Always ask a man", et qui commence par cette touchante confession : "Il n'est pas très difficile de savoir ce qui plait à un homme. Et la meilleure chose à faire est tout simplement de le lui demander. C'est ce que j'ai passé ma vie à faire, en commençant enfant par mon père, auquel je demandais toujours l'avis sur mes robes et mes coiffures. Il adorait l'odeur de la savonnette à la lavande, aussi je prenais soin de bien me laver le visage avant de l'embrasser chaque soir en lui souhaitant bonne nuit ".








Il y eut Doris Day et ses aphorismes sur l'hygiène de vie, nous le savons, ajoutons à présent Arlene au club très fermé des gens suaves qui partagent : taisons nous et écoutons ses précieux conseils, empruntés à cet ouvrage aux chapîtres délicieusement nommés "l'art perdu de la féminité", "l'amour se cache dans les cheveux" ou encore "Encadrer un chef-d'oeuvre : comment s'habiller".
"Aujourd'hui beaucoup d'hommes nous accusent, nous les femmes, de vouloir entrer en compétition avec eux au lieu de les charmer. Et c'est ainsi que nous oublions nos charmes et nos attraits en nous concentrant sur nos carrières et la volonté d'être leurs égales. C'est une erreur. La féminité est la chose la plus précieuse chez une femme et ce serait une folie de l'oublier. Pourquoi ne pas plutôt focaliser notre énergie sur des choses qui plaisent aux hommes : être capable de les écouter ( les hommes détestent les moulins à paroles), cultiver son propre style en découvrant ce qui nous rend séduisante, en choisissant une couleur qui nous définira par exemple ou un parfum, cultiver son sens commun, et un sens de l'humour. Comme me le confiait en riant mon bon ami Yul Brynner "une femme n'a pas besoin d'être logique".




"Ce qu'une femme possède de plus précieux est son teint, et son mirroir à trois panneaux, afin qu'elle puisse se voir de derrière avant de sortir. Un joli teint est comme une gravure marocaine sur un livre précieux ou le grain du bois sur un meuble rare. Les bébés viennent au monde avec ce cadeau, les femmes arabes, sous leurs voiles, le protègent car elles savent que le soleil et le vent le tranformeront vite en vieux cuir usé."


"Il n'est pas nécessaire d'être d'une grande beauté pour être séduisante et chic. Les vêtements et les perruques sont là pour nous aider. Les vêtements par exemple devraient vous rendre plus belle aux yeux des hommes. Il convient simplement de les adapter à la situation. On ne va pas à un pique-nique en robe de ball ni à un dîner chic en maillot de bain. Pour être très précise, je dirais qu'il n'est pas adapté : de porter des diamants au petit-déjeuner, d'être habillée de plus de trois couleurs, de mettre des chaussures en plastique, quelle que soit les circonstances, d'opter pour une robe sans manche si vous êtes obèse ou d'être vue avec des rouleaux sur la tête. Les perruques, qui sont devenues très à la mode, sont la solution idéale pour être parfaitement coiffée rapidement, ou changer radicalement de couleur de cheveux si vous y êtes prête psychologiquement. Il en existe de toute forme, à tous les prix. Choisissez-les soigneusement et surtout assez serrées pour qu'elles restent en place, mais pas trop serrées non plus : une perruque ne devrait jamais vous donner de migraine. "


Si vous avez ri ou simplement levé les yeux au ciel, n'en soyez pas fiers. Ces simples conseils ont permis à Arlene Dahl de traverser les âges avec grâce. Et si vous en doutez, laissez glisser votre regard vers cette dernière photo avec son fils : ne crie-t-elle pas "J'ai peut-être ma carte vermeil mais je suis suave " ?

2 commentaires:

Jill a dit…

I wish I spoke French!

soyons-suave a dit…

Jill, one word : champagne ! My first comment... I am going to cry. Thank you.