jeudi 7 janvier 2010

C'est comment chez vous ? Les leçons de décoration de Soyons-Suave.

Inaugurons dès aujourd'hui une nouvelle rubrique dans Soyons-Suave qui, comme vous l'avez peut-être remarqué avec nos conseils éclairés concernant la réfection de votre salle de bains, a décidé de se lancer dans la décoration et l'architecture d'intérieur de façon sérieuse.

Pour sa première apparition, "C'est comment chez vous ?" vous propose de vous introduire chez le très intrigant Gary Cooper, qu'on associe plus à un colt ou un cheval, ou éventuellement à Marlène Dietrich, qu'à un plan de coupe ou à un permis de construire. Et c'est une erreur, car Gary Cooper était un grand amateur d'architecture, un véritable esthète en matière de bon goût, un admirateur du style le plus pointu, le plus in, le plus suave : le style moderniste.



Ce n'est d'ailleurs pas par hasard qu'il accepta immédiatement le rôle principal du "Rebelle", "The Fountainhead" en version originale, que réalisa King Vidor en 1949 d'après le roman du même nom signé Ayn Rand, qui deviendra grâce à cela, entre autre, la grande prêtresse de la pensée libérale aux Etats-Unis. Très inspiré de la personnalité de Frank Lloyd Wright, auteur de la plus célèbre maison d'architecte au monde, la "Fallingwater" et du plus célèbre musée au monde (pour son architecture), le Guggenheim de New York, le film mettait en scène un architecte individualiste, refusant les compromis, les collaborations, toute autre vision que la sienne et qui n'hésitait pas à faire exploser les constructions qu'il ne jugeait pas fidèle à ses plans.



Et si le film fut renié par l'auteur du livre et reçut de charmantes critiques ("le film le plus inepte produit à Hollywood depuis des années" d'après le NYTimes), il donna en tout cas envie à Gary Cooper d'affronter aussitôt dans la vraie vie les joies des réunions de chantier et des maîtres d'oeuvre caractériels. Et c'est ainsi qu'au début de 1953, il engagea l'architecte A. Quincy Jones (rien a voir avec l'autre sans A.) afin qu'il construise la maison de ses rêves. L'acteur ne connaissait rien au monde du bâtiment, aussi il ne donna que de rares indications : quelque chose de moderne, avec de la pierre, du verre et de l'acier... et une piscine agrémentée d'une cascade, Hollywood quand même.



C'est en 1955 que la famille Cooper put enfin enménager et ouvrir la maison à la presse et à leurs nombreux amis. On s'émerveillait des tableaux de maîtres français et des Picasso, des meubles de style installés par Billy Haines, le décorateur des stars, ancien jeune premier de la MGM et quand ce n'était pas Jane Russel qui passait en voisine faire une bise rapide, c'était Judy Garland et Frank Sinatra qui, bon d'accord, mais juste une, acceptaient de finir les dîners en musique.


Gary Cooper resta dans cette maison jusqu'à sa mort d'un cancer en 1961, après quoi elle changea de nombreuses fois de propriétaires, de décor et de style jusqu'à ce que deux amoureux l'achètent en 1998 et décident de lui redonner sa splendeur passée.



Parmi les derniers vestiges intacts d'un certain âge d'or de l'architecture américaine, la Cooper House ne se visite pas et c'est dommage. Car elle propose quelque chose qui est au-delà du suave : un des rares exemples de bon goût hollywoodien. Ici pas d'hacienda, pas de villa mauresque, pas de copie des chateaux de la Loire. Des lignes sobres, claires, sans tralala.

Mais rassurez-vous, il sera bien sûr tout aussi suave de pénétrer dans d'autres intérieurs où il sera difficile de ne pas pousser un cri. Ben oui. Tout de même.

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