dimanche 24 janvier 2010

La fin du quizz



Tout arrive ! C'est en soit une nouvelle réjouissante alors réjouissons-nous car voici, non seulement la solution officielle du dernier quizz mais surtout la première grande victoire de Woky, qui voit donc son nom en noir sur blanc sur Soyons-Suave, pour avoir su lever son regard de ce maillot distendu et distinguer les traits charmants de Loretta Young, moins reconnaissable de profil car pose moins prompte à laisser s'exprimer ce que les mauvaises langues appelaient ses uniques atouts de comédienne : ses pommettes et ses dents.



De son vrai nom Gretchen Young, Loretta Y. fut certainement la star hollywoodienne possédant le plus de surnoms détestables dans l'industrie cinématographique. Avec une carrière qui débuta véritablement à la fin des années 20 et s'acheva en 1989, elle eut largement le temps de mériter, parait-il, les doux soubriquets de "Veuve noire", "Gretchen la sorcière", "Le papillon de fer", "Manipulator" ou encore "La nonne Attila", la dernière référence étant due à son goût pour les rôles de religieuses.

Les plus aimables se contentaient de "Sainte Loretta", ce qui n'était guère plus amical et tournait en dérision sa foi excessive qui en fit une des plus acharnées combattantes pour l'ordre moral aux Etats-Unis. Anecdote célèbre : Joan Crawford s'écriant au producteur Ross Hunter alors qu'il allait s'assoir dans un fauteuil lors d'une party : "Malheureux, pas ce fauteuil, Loretta Young y était il y a peu, elle doit y avoir laissé une trace de croix en se levant".


Le puritanisme excessif dont fit preuve Loretta Young à partir des années 50 et qui s'exerça lors de nombreuses conférences qu'elle donnait à travers les USA, la présidence d'une ligue de vertu et même par une mission officielle en tant que responsable d'un comité de censure chrétien oeuvrant pour une littérature "propre" sous le mandat de Ronald Reagan en tant que gouverneur de Californie, amusa fort tous ceux qui firent sa connaissance lors de son arrivée à Hollywood. Car dans les années 30, on ne parlait pas d'elle comme de "la Mère Supérieuse de la télévision", autre surnom que nous avions sauté. Elle était celle qui, âgée de 17 ans, avait épousé un de ses partenaires, sans passer par l'église (ce qui la priva de confession pendant quelques années), celle qui hantait les soirées et dansait sur les tables mais surtout, celle qui avait eu un enfant illégitime avec Clark Gable.



L'histoire est trop belle pour ne pas être racontée une nouvelle fois. En 1935, Loretta et Clark tournent ensemble l'adaptation de "L'appel de la forêt" de Jack London. Le tournage se déroule en plein Klondike, il fait froid, il n'y a rien à faire en dehors des heures de travail et Loretta et Clark se rapprochent dangereusement... dangereusement car si Loretta est séparée de son premier mari, Clark, lui, est bel et bien marié. Alors que des rumeurs commencent à circuler sur une liaison qui aurait pu coûter cher à sa carrière, Loretta décide, sitôt la fin du tournage, de prendre une année sabbatique afin de soigner une mystérieuse maladie.

Plus d'un an plus tard, elle réapparaît plus belle que jamais, visiblement remise, stupéfiant simplement son entourage en présentant une enfant, qu'elle aurait adopté sur un coup de tête pendant son absence, ce que pourtant les lois californiennes interdisaient à l'époque aux célibataires. L'enfant de plus, possède "les plus grandes oreilles jamais vues ailleurs que sur un éléphant" dira le réalisateur William Wellman et les mêmes pommettes que Loretta. Malgré cela, Loretta continua de présenter la petite Judy comme sa fille adoptive, tout en l'affublant en permanence de bonnets jusqu'à ce qu'elle soit en âge de subir une opération destinée à recoller ses appendices disgracieux.

Le public américain avala doucement la chose grâce aux fan-magazines qui répandirent la belle histoire de la belle actrice et de la belle orpheline, qui ressemblait tout de même beaucoup à sa mère adoptive, une chance, ou un signe de Dieu. Ce n'est qu'en 1994 que Judy Lewis se décida à écrire toute la vérité sur son identité, qu'elle n'apprit réellement qu'à l'âge de 25 ans, dans un livre que sa mère refusa de lire et de commenter, les deux ne se parlant plus depuis les années 60 quand Judy lui annonça qu'elle souhaitait être comédienne.



Mais un peu de suave pour finir. Loretta Young fut une des premières star de l'écran à croire en la télévision et surtout à s'y consacrer pleinement. En 1953 elle se lança dans "Letters for Loretta", rapidement rebaptisé "The Loretta Young Show" dans lequel elle présentait une fiction d'une trentaine de minutes dans laquelle elle jouait souvent le premier rôle, des histoires où le bon goût le disputait aux bons sentiments : patriotisme, générosité, courage, piété et même miracle à Lourdes dans un épisode devenu un classique, édité en DVD. Productrice, responsable du scénario, Loretta anima jusqu'en 1961 ce qui allait devenir un des programmes préférés des américains mais pas tout à fait pour la raison qu'elle imaginait.

Alors qu'elle était persuadée de subjuger les foules devant leur écran par le message plein d'amour qu'elle transmettait chaque semaine, les millions de téléspectateurs ne se réunissaient souvent devant leur poste que pour les 5 premières minutes du show, qui montraient inmanquablement Loretta ouvrant la porte d'un living-room immaculé, dans une robe merveilleuse et surtout en exécutant une gracieuse pirouette lui permettant de montrer toutes les facettes de sa toilette. La "Pirouette Loretta" devint tant sa marque de fabrique que lorsqu'elle dut s'absenter pour raisons de santé pendant une partie de la seconde saison de son show, elle ordonna qu'aucun des comédiens invités à la remplacer ( Barbara Stanwyck, Rosalind Russell, Claudette Colbert, Irene Dunne, Ann Sothern, Merle Oberon, Joan Fontaine...) n'ait le droit d'ouvrir la porte et surtout de jouer au derviche tourneur.

Aussi avant de vous laisser sur quelques ouvertures de porte aériennes et sautillantes, ajoutons que si la vie est parfois paradoxale et insondable, elle est heureusement souvent suave, permettant à une comédienne très moyenne au visage admirable qui ne tourna jamais le dos aux opportunités que la vie lui offrit, de devenir une légende en montrant le sien 3 secondes chaque semaine à la télévision.

Et maintenant tout le monde tourne !





1 commentaire:

Anonyme a dit…

Vos doux lecteurs poussent la suavité jusqu'à laisser passer "les doux soubriquets" de Miss Young, sans attribuer un seul "sobriquet" à votre relecteur.

Randolph, dur de la tête au pied, pour votre plus grand bien.