mardi 24 août 2010

Les très suaves heures de l'histoire contemporaine : le jour où Barbara Stanwick dit non !


L'amitié pendant près de 40 ans entre Barbara Stanwyck et Joan Crawford fut certainement un supplice de Tentale pour les journalistes hollywoodiens qui, comme la bonne du curé immortalisée par Annie Cordy et censure oblige, voulaient bien mais ne pouvaient point. Barbara, étrangement mariée à Robert Taylor qui faisait défiler tout Hollywood dans son lit et Joan, croqueuse de tout sans distinction de jupes ou de pantalons, étaient inséparables et on ne pouvait rien sous-entendre, si ce n'est que ces deux-là, faisant fi des rivalités de studio, étaient très amies.

Depuis leur rencontre dans les années 30 jusqu'à la mort de Joan en 1977, les deux "bonnes copines" dinaient fréquemment entre filles, allaient danser sans cavalier et dormaient occasionnellement l'une chez l'autre. Et lorsqu'elles posaient de façon plus cérémonieuse pour les fan magazines ou se croisaient lors de très officielles manifestations, elles finissaient toujours par se toucher, s'embrasser, s'étreindre. Ces deux femmes étaient très tactiles, même accompagnées de leurs maris.

Avec Franchot Tone et Robert Taylor. Les femmes s'enlacent, les hommes s'approchent.

On peut facilement imaginer ce qui pouvait rapprocher la star de la MGM et celle qui était en 1944 la femme la mieux payée des USA. Joan et Barbara venaient de milieux plus que modestes, elles avaient grandi dans des foyers désunis et ne devaient qu'à elles-mêmes leur succès. Elles avaient de plus réussi dans un monde d'homme à être respectées et s'imposaient pour rester au sommet une discipline de fer. Elles avaient enfin connu toutes deux des débuts inavouables, films érotiques pour Joan et cabaret lesbien pour Barbara. On apprécie d'autant plus la gloire quand on a connu le caniveau.

Pourtant, deux caractères aussi forts peuvent faire des étincelles et il est assez évident que des deux, c'est Joan qui portait la culotte. Invitée à déjeuner en compagnie des deux stars, la journaliste Shirley Eder raconte comment elle ne put que contempler, médusée, Joan Crawford commander du foie de veau saignant pour elles trois, sans demander l'avis de quiconque et Barbara venir tant bien que mal à bout de sa pièce d'abat sanguinolent, sans dire un mot. Christina Crawford n'aurait donc pas que menti dans son livre charmant "Mommie Dearest", relatant exactement le même genre de scène entre elle et sa mère.

Et si on se rendait visite sur les plateaux ? Notons que cette fois James Stewart réussit à toucher Henry Fonda...

Si Barbara sut, à la fin des années 50, négocier sa transition du grand au petit écran, devenant à l'occasion grâce à "La grande vallée" et plus tard "Les oiseaux se cachent pour mourir", la femme la mieux payée de la télévision, la fin de carrière de Joan fut plus laborieuse : de délicieux films d'horreurs, un peu de Pepsi et beaucoup de Vodka. Rien pourtant dans son attitude ne pouvait laisser entrevoir la moindre déchéance, Joan était toujours parfaite, totalement suave, résolument star, jusqu'à dans son comportement, ce qui pouvait porter un peu sur les nerfs. Que Miss Crawford exige que ses plateaux soient maintenus à la température de 15° celcius lorsqu'elle tourne, que des distributeurs de Pepsi soient immédiatement installés lors de la moindre de ses apparitions passe encore, mais qu'on se plie, dans le privé, à ses moindres caprices, c'est autre chose.

Un beau jour de 1972, alors que Joan revient de New-York, elle téléphone à Barbara, heureuse d'être de retour en Californie et mourant d'envie de dîner avec son amie de toujours. Barbara est enchantée, tant de choses à se raconter, d'embrassades à venir, c'est bien simple, elle est presque en route vers son dressing lorsqu'elle entend Joan ajouter qu'elles dîneront à 16 heures, l'estomac de la star étant toujours sur le fuseau horaire de la côte Est. Barbara fait une pause, réfléchit et répond "non", qu'elle n'a aucune envie de dîner aussi tôt mais que ce sera un plaisir lorsque le décalage horaire intestinal de Joan ne sera qu'un mauvais souvenir.



Amies depuis 40 ans et sans doute plus qu'amies, Joan n'adressa plus la parole à Barbara, qui fut l'une des grandes absentes lors des cérémonies suivant le décès de Joan où étaient présents d'aussi diverses personnalités que Myrna Loy, John Wayne, George Cukor ou Andy Warhol. Barbara, dans les interviews qu'elle donna par la suite, n'évoqua Joan qu'en termes élogieux, la défendant lorsqu'en 1981, le tabloïd "Hollywood Star" publia une liste de 101 supposées stars bisexuelles, dont Barbara occupait la première place et Joan la quarantième. "Joan était mon amie et c'est tout ce que j'ai à dire". Franchement Barbara, est-ce que pour une amie justement, on n'est pas prête à déguster une tranche de foie de veau à l'heure du thé ? Pas très suave finalement cette attitude...

5 commentaires:

Claire a dit…

Pas suave du tout en effet. Moi je serais prête à manger du foie de morue au petit dej pour toi !!

Woky a dit…

quelle suave idée que cette semaine consacrée à Joan crawford! bravo!

soyons-suave a dit…

@Claire : nous écrasons une larme d'émotion... et sommes allés faire quelques courses. Les foies sont prêts. Demain, 7h30 ?
@Woky : nous écrasons une seconde larme. Welcome back, vous nous avez manqués.

Claire a dit…

Foies de morue, oui, mais aux aurores, faut pas trop en demander ! (je sais, je perds un peu de ma suavitude...)Si on disait 9h00 ?

thedivinefeud a dit…

que j'aime ce quasi jeu de mains entre Taylor et Tone, c'est si suave...